Richard Desjardins – Tu m’aimes-tu

Publié: 30 mars 2012 dans Chanson, Chanson québécoise, Desjardins Richard
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La scène se déroule, à la fin des années 80, quelque part dans ce « bout du monde » que représente l’Abitibi (région excentrique à l’ouest du Québec qui n’a été colonisée qu’au milieu du siècle dernier et qui est aujourd’hui une région presque essentiellement minière et forestière).

Richard Desjardins, cet auteur-compositeur-interprète québécois né le 16 mars 1948 à Rouyn-Noranda (au coeur même de la région) produit, de peine et de misère, son premier disque solo, album qu’il finance lui-même par la vente de l 000 parts de 10 dollars en prévente de l’album « Les Derniers humains » qu’aucune compagnie de disque ne voulait, ou ne souhaitait, produire.

Un succès au milieu de nulle part

Fort d’un certain succès auprès des stations de radio communautaires, Desjardins lance un deuxième album qu’il doit, encore une fois, autoproduire à l’aide de souscriptions en pré-vente. Le disque « Tu m’aimes-tu » (1990), est enregistré en deux jours à la Chapelle du Bon Pasteur où il s’accompagne seul sur le fameux piano Fazioli que possède cette salle de concert. Et le miracle se produit.. Richard Desjardins réussira à vendre sa chanson « Tu m’aimes-tu » à plus de 100 000 exemplaires en un temps record et la popularité soudaine de la chanson marquera pour lui le début d’une carrière qui le fera rapidement connaître au Québec et en Europe.

La consécration

Cet enviable succès trouve écho outre-Atlantique. Le programmateur du Théâtre de la Ville, à Paris, l’engage en effet dans son prestigieux théâtre et Desjardins évolue devant le tout-Paris trois soirées durant. Cette première apparition en sol français n’est que la première d’une longue série. Après avoir présenté son spectacle solo à quelque 450 reprises au Québec, en France, en Suisse et en Belgique, Desjardins effectue un retour aux sources en renouant avec ses compères d’Abbittibbi, avec qui il produit l’album « Chaude était la nuit« .

Plus tard en 2005,  Richard Desjardins livrera son album Kanasuta à l’Olympia de Paris.  Ce spectacle sera en quelque sorte une consécration. La reprise de sa chanson Quand j’aime une fois j’aime pour toujours, par Francis Cabrel, l’a certes davantage fait connaître auprès du grand public, mais Desjardins demeurait malgré tout un secret bien gardé dans l’Hexagone. Cette unique représentation à l’Olympia allait quelque peu changer la donne. « Si Léo Ferré devait avoir un héritier, ce serait lui », écrivait d’ailleurs le très critique hebdomadaire L’Humanité.

Je vous propose, tout d’abord, de réentendre, en audio seulement, la version orginale de sa chanson « Tu m’aimes-tu » dont l’enregistrement a été fait par Desjardins à la Chapelle historique du Bon Pasteur de Montréal où il s’accompagne seul au piano.  Personnellement c’est cette version de la chanson que je préfére entre toutes. J’ai encore en mémoire le moment précis où j’ai entendu cette chanson pour la première fois. Je roulais en voiture sur le Chemin St-Louis à Québec et j’ai dû m’arréter sur le bord de la route tellement j’étais subjugé par l’intensité de l’interprétation de Desjardins. …

Source: Source: Biographie de Richard Desjardins (site officiel)

Photographie de M. Georges Dutil

Richard Desjardins – « Tu m’aimes-tu » – 

Enregistré à la Chapelle du Bon Pasteur de Montréal (1991)

Un homme libre

Richard Desjardins est aussi un homme d’engagement. Son combat pour la réforme du régime forestier québécois (il a coproduit le film « L’erreur boréale »)  et sa lutte plus récente contre les pratiques douteuses des compagnies minières en Abitibi (« Trou Story ») ont aussi fait couler beaucoup d’encre. Mais Richard Desjardins, c’est toujours et surtout  » un grand artiste, un poète impénétrable. Il a su donner de l’altitude aux galeries souterraines. Il a su tirer le souffle du soufre, comme les « fleurs du mal ». Et des fonderies, faire des jardins….  » (1)

Voici une version vidéo HD plus récente (datant de 2005) de la même chanson « Tu m’aimes-tu »  tirée cette fois du spectacle Kanasuta où Desjardins était accompagné sur scène par les musiciens de Kanasuta.

groupe Abbittibbi

« Tu m’aimes-tu » de Richard Desjardins

Tiré du spectacle « Kanasuta: Là où les diables vont danser » ; enregistré à Trois-Rivières en mars 2005

(1) Nadia Peiellon, Série Richard Desjardins: un homme libre.

     

Tu m’aimes-tu

Paroles et musique de Richard Desjardins

Ton dos parfait comme un désert
Quand la tempête a passé sur nos corps
Un grain d’beauté où j’m’en vas boire
Moi j’reste là les yeux rouverts
Sur un mystère pendant que toi tu dors
Comme un trésor au fond de la mer

J’suis comme un scaphandre
Au milieu du désert
Qui voudrait comprendre
Avant d’manquer d’air

Y est midi moins quart
Et la femme de ménage
Est dans l’corridor
Pour briser les mirages

T’es tell’ment tell’ment tell’ment belle
Un cadeau d’la mort
Un envoi du ciel
J’en crois pas mon corps

Pour moi t’es une prisonnière
En permission qu’importe le partenaire
J’dois être le vrai portrait d’ton père
Un dare devil Nefertiti
Des sensations c’tu ta philosophie
D’aller coucher avec un homme thaïs

Pour moi t’as dit à ta chum
 » Checkc le gars ’ec des lunettes
M’as t’gager un rhum
Que j’y fixe le squelette « 

Y est midi moins quart
Et la femme de ménage
Est là pis a fait rien qu’
Compter les naufrages

T’es tell’ment tell’ment tell’ment belle
Un paquebot géant
Dans ’chambre à coucher
Je suis l’océan qui veut toucher ton pied

J’pense que je l’ai j’t’ai sauvé’a vie
Dans quelqu’pays dans une vie antérieure
La fois j’t’ai dit  » Va pas à Pompéi!  »
C’est quoi d’abord si c’est pas ça
C’t’à cause d’un gars qui t’a tordu le cœur
J’t’arrivé drett’avant qu’tu meures

C’pas pour mon argent
Ni pour ma beauté
Ni pour mon talent…
Tu voulais-tu m’tuer

Y est midi tapant
Et la femme de ménage
A cogne en hurlant
 » J’veux changer d’personnage « 

T’es tell’ment tell’ment tell’ment belle
J’vas bénir la rue
J’vas brûler l’hôtel
Coudon…
Tu m’aimes-tu
Tu m’aimes-tu

Autres chansons chantées par des Québécois sur le site J’ai la mémoire qui chante:


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commentaires
  1. J.A.D. Noël dit :

    Je viens de faire la découverte de votre site, … quel enchantement ! Pour le moment, je suis étonné de ne rien trouver de Jacques Michel. — Bonne continuation !

  2. Georges Dutil dit :

    Et, les crédits photos??? Comme vous ne payez pas les photos, ayez au moins la gentillesse de donner le crédit aux photographes qui peinent à gagner leur vie par les temps qui courent. Mettre leurs liens serait aussi, une heureuse initiatives. Le deuxième portrait de Richard Desjardins est de Georges Dutil. Pour voir son travail : https://www.facebook.com/GeorgesDutil.Photographe

    • Nous n’hébergeons que très exceptionnellement des photos sur ces pages puisqu’elles n’y sont présentes que via un hyperlien vers des sites où elles sont hébergées physiquement. Ainsi la photo de Desjardin’s que vous mentionnez est située sur le site « Esprits Nomades » où il n’y a aucun crédit indiqué relatif à la photo. Il était donc impossible pour moi de donner des crédits que j’ignorais.

      C’est donc avec plaisir que j’ai fait un ajout sous la photo pour identifier les crédits qui vous reviennent à juste titre pour cette excellente photographie de Richard Desjardins.

  3. J’adore les chansons de Richard Desjardins. Elles sont magnifiques.

  4. Saldou dit :

    Thaïs: Il me semble que c’est plutôt une référence à la courtisane d’une beauté incroyable pour laquelle les hommes s’entretuaient et qui a passé des années en cellule scellée pour la rémission de ses péchés. Relisez bien tout le couplet. « Prisonnière en permission, qu’importe le partenaire »

    • A la relecture, je pense que vous avez sans doute raison… merci de nous avoir fait part de votre interprétation !

      • Saldou dit :

        Merci de m’avoir fait connaître-honte à moi de cette ignorance!- cet étonnant troubadour aux images fulgurantes et tellement tellement belles!

      • Pipeau dit :

        Bonjour,

        Je pense, pour l’avoir parfois entendu au Québec, que c’est plutôt lié à la prononciation locale du verbe « haïr ». Là où les Français disent « je le hais », les Québécois disent « je l’haïs ». « D’aller coucher avec un homme thaïs », signifierait donc « D’aller coucher avec un homme (que) tu hais ».

        J’espère n’être pas trop « niaiseux » sur ce coup-là ;-)…

    • Je pense que vous avez raison…

  5. poirier jean claude dit :

    dieu sait que j’adore la chanson d’expression française,mais je viens de ressentir un bonheur incroyable à lécoute de cette chanson,je connaissais le nom de Desjardins mais aucune de ses chansons.Par contre je ne comprends pas le 6éme paragraphe,merci de me le traduire

    • Je ne suis pas certain de pouvoir satisfaire entièrement votre curiosité concernant ce 6ième paragraphe dont certains extraits me paraissent tout aussi obscur qu’à vous. Allons y tout de même:

      Pour moi t’es une prisonnière
      En permission qu’importe le partenaire
      J’dois être le vrai portrait d’ton père
      Un dare devil Nefertiti
      Des sensations c’tu ta philosophie
      D’aller coucher avec un homme thaïs

      Daredevil:
      Un « Daredevil » est un personnage de comics appartenant à l’univers de Marvel Comics qui a été créé en 1964. L’expression anglaise daredevil, souvent utilisée pour qualifier les acrobates ou autres cascadeurs, peut se traduire par « casse-cou » littéralement « Tente le Diable ».

      Nefertiti:
      Néfertiti (dont le nom signifie « la belle est venue ») est la grande épouse royale d’Akhénaton, l’un des derniers rois de la XVIIIe dynastie (civilisation égyptienne antique). Sa beauté est légendaire, et il est certain qu’elle exerçait un rôle politique et religieux important pendant la période amarnienne….

      Et le dernier ver me pose encore plus de problème:
      Je comprends à l’oreille « D’aller coucher avec un homme que t’hais » (que tu hais) mais pourtant toutes les paroles que l’on trouve sur internet reprenne l’écriture que j’ai indiquée dans l’article.
      Si je colle à ce que j’entends je traduirais les derniers vers de la façon suivante:

      Es-tu à ce point une adepte des sensations extrêmes
      Que tu veuilles coucher avec un homme que tu détestes

  6. jaku dit :

    çà vibre… çà vibre comme la première fois où je l’ai entendue (avec piano seul)
    çà vibre… çà souffle…

  7. Lise dit :

    Bonjour Pierre,

     »Y va toujours y’avoir »… Y qu’on l’aime, lui pis sa poésie ! Comme il est beau, parce que vrai, talentueux, engagé, libre et mystérieux ! Oui, j’t’aime !

  8. Monique dit :

    J’ai découvert Richard Desjardins avec cette chanson. Je peux l’écouter en boucle. J’adore cette formule « Tu m’aimes-tu ? ». Merveilleuse aussi : « Va-t’en pas »…

    • Je suis d’accord avec vous, Monique. L’expression « Tu m’aimes-tu » n’est pas un équivalent du classique « M’aimes-tu« . Il y a dans cette interrogation où le sujet est répété une référence à la naïveté du monde de l’enfance (où l’on retrouve souvent cette tournure de phrase) que ne comporte pas la simple interrogation « M’aimes-tu? ». Et c’est, je crois, cette connotation qui donne un côté touchant à cette expression.

  9. Melocoton dit :

    « Poète impénétrable »..c’est vrai que les textes de Richard Desjardins sont parfois hermétiques mais même lorsque c’est le cas… Bon Dieu c’ qu’on aime à l’entre c’t homme là !

    J’ai adoré sn « Desjardins symphonique » avec l’orchestre symphonique des Trois-Rivières qui est une pure merveille.

    • Comme je l’ai mentionné précédemment (en réponse à la question de Jean-Claude) l’hermétisme des textes de Desjardins n’est pas seulement une question « d’expressions québécoises ». Il utilise souvent et volontairement des mots qui peuvent être compris de plusieurs façons. Comme dans sa chanson « Quand j’aime une fois »:

      Je veux toucher du doigt
      La peau de ton tambour

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