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Une chanson populaire anonyme
On présente spontanément la chanson Au clair de la lune comme étant une simple chanson pour enfant puisque c’est, en général, la toute première chanson d’expression française que les tout petits apprendront de leurs parents, avant même leur arrivée à l’école. Cette chanson, dont nous ne connaissons souvent que les deux premiers couplets, constitue une sorte de porte d’entrée dans la culture collective francophone. Certains diraient qu’il s’agit là d’un véritable rite d’initiation propre aux civilisations d’expression française.
La chanson « Au clair de la lune » est une chanson populaire française anonyme qui date du XVIIIe siècle. La musique en est généralement attribuée à Jean-Baptiste Lulli et elle aurait été construite à partir d’un air de ballet de Cadmus (1674) mais cette origine est controversée. D’autres sources pensent que son timbre provient d’un air de contredanse apparu vers 1775 sous le titre de La rémouleuse. Quoi qu’il en soit, on sait avec certitude que la chanson était déjà très connue dès 1780.
Une chanson coquine:
Il semble que dans la version originale de la chanson, il y était dit « Prête-moi ta lume » plutôt que « Prête-moi ta plume ». Lume vient évidemment du mot lumière (en vieux français) et c’est de lumière dont on a surtout besoin pour écrire lorsque sa chandelle est morte. Il faut donc du feu pour rallumer la chandelle et avoir ainsi de la lumière. Cette version est plus cohérente avec « la voisine qui bat le briquet« , c’est-à-dire qui allume le feu qui pourra rallumer la chandelle. Ce sens originel est évidemment perdu avec la version « Prête-moi ta plume ».
On trouve, par contre, certaines interprétations plus osées des mêmes expressions. En effet, « on bat le briquet« serait une expression courante signifiant « on y fait l’amour« . On retrouve ainsi dans un recueil paru à Lyon en 1553 – donc antérieure à la chanson proprement dire – un couplet qui présente une assez forte ressemblance et qui peut nous laisser croire à une telle interprétation coquine:
Las, je suis toute nue
Et si courte tenue
Que ne vous puis aider
Si faisait belle lune
J’écrirais d’une plume
Bon soir vous soit donné
Un personnage issu de la Comedia Del Arte
Quoi qu’il en soit, rappelons que le personnage de « Pierrot » est né de la « comedia del arte« . Une version française un peu édulcorée d’Arlequin, un arlequin plus doux et gentil, qui ne fait pas peur. Pierrot, qui a pour ancêtre Pedrolino, Pierro ou Piero, est au nombre des multiples valets qui peuplent la comedia del arte, et le personnage apparaît aux environs de 1547. Il est affublé d’un chapeau conique et d’un costume blanc, avec une blouse ample et une très longue écharpe. Contrairement à certains de ses confrères de planches, il ne porte pas de masque : sa pâleur légendaire lui vient d’un visage enfariné jusqu’au bout des oreilles.
Il est assez certain qu’avant de devenir la petite rêverie « enfantine » que la chanson « Au clair de la lune » est aujourd’hui devenue, cette chanson était une polissonnerie empreinte d’un certain érotisme en filigrane que nous avons perdue au fil des années. Mais pas complètement, vous vous en doutez bien, grâce notamment à cette chère Colette Renard que je vous proposerai de redécouvrir dans quelques instants.
Deux versions « classiques » de la chanson
Écoutons tout d’abord deux versions relativement « classiques » de la chanson. La première, est tout à fait contemporaine et elle est chantée par la douce voix de Dominique Dimey (oui, oui, il s’agit bien de la fille de Bernard Dimey dont nous avons déjà présenté la « Chanson pour Bernard » dans une publication récente).
La seconde version que nous vous proposons aujourd’hui, nous fait remonter quelque peu dans le temps puisque vous entendrez la céleste voix de la grande Yvonne Printemps qui était, à l’époque – faut-il le rappeler – Madame Sacha Guitry.
Au clair de la lune – Dominique Dimey (1999)
Au clair de la lune – Yvonne Printemps (1931)
Illustration de la chanson « Au clair de la lune » par Louis-Maurice Boutet de Monvel.
Au clair de la lune (chanson traditionnelle)
Au clair de la lune
Mon ami Pierrot,
Prête-moi ta plume
Pour écrire un mot.
Ma chandelle est morte,
Je n’ai plus de feu ;
Ouvre-moi ta porte,
Pour l’amour de Dieu.
Au clair de la lune,
Pierrot répondit :
« Je n’ai pas de plume,
Je suis dans mon lit.
Va chez la voisine,
Je crois qu’elle y est,
Car dans sa cuisine
On bat le briquet. »
Au clair de la lune,
Pierrot se rendort ;
Il rêve à la lune,
Son cœur bat bien fort.
Car toujours si bonne
Pour l’enfant tout blanc,
La lune lui donne
Son croissant d’argent.
Une version « gaillarde »
L’esprit « coquin » de la chanson originelle a, sans aucun doute, servi de fond de scène à Collette Renard dans son adaptation « gaillarde et libertine » de la version enfantine d’ « Au clair de la Lune », version que je vous propose maintenant de redécouvrir. Cette grande chanteuse qu’est Collette Renard, dont le nom restera longtemps attaché à la comédie musicale Irma la douce est musicienne, comédienne et actrice mais elle n’hésitera pas à interpréter, au début des années 60, tout un répertoire de chansons paillardes, gaillardes et libertines. Elle y sera aidée par le journaliste, écrivain et historien, Guy Breton, qui recueillera, arrangera – et parfois réécrira – de nombreuses chansons paillardes. Colette Renard (de son vrai nom Colette Raget) nous les interprète avec un talent sans pareil. Sa voix très expressive, son interprétation et sa diction tout à fait singulière, la rendent reconnaissable dès le premier couplet.
Au clair de la lune (Version gaillarde) – Colette Renard (1960)
Au clair de la lune (version gaillarde)
Au clair de la lune,
Mon ami Pierrot.
Prête-moi ta plume,
Mon mari est sot.
Sa chandelle est morte
Et manque de feu.
Ouvre-moi ta porte.
Pour baiser un peu.
Au clair de la lune,
Pierrot répondit:
Je garde ma plume
Pour baiser Nini.
Va chez la voisine:
Elle aim’ s’amuser.
Elle est un peu gouine,
Elle a du doigté.
Mais chez la voisine
Y avait un mond’ fou.
Des chambres aux cuisines,
On baisait partout.
Et sur la pelouse,
Des gens distingués
Faisaient une partouze:
C’était follement gai.
Au clair de la lune,
J’entrai dans le jeu.
Entourée de plumes:
C’était merveilleux.
J’en pris une belle
Sur un rayon d’or.
Ah ! quelle chandelle !
Je la sens encore.
Au clair de la lune,
Je fus au déduit (1).
Je pris tout’ les plumes,
Oh! la, la! Quelle nuit!
Soufflées de la sorte
Par le vent d’amour,
Les chandelles sont mortes
Au lever du jour.
(1) déduit = occupation procurant du plaisir, plus particulièrement du plaisir amoureux.
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- Giani Esposito – Le Clown
- Boby Lapointe – Méli-mélodie
- Raymond Souplex – La biche au bois
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- Boby Lapointe – La Maman des poissons
- Étoile des neiges – Patrice et Mario
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